Voici le récit de notre dernière réalisation au Portugal. Celle-ci a été faite à Santo Antonio, à côté de Loures qui est à une quarantaine de minutes de Lisbonne. Nous étions déjà passés au Portugal pour aller au Maroc, il y a quelques années mais c’est la première fois que nous y venons pour réaliser une fresque. Nous voilà alors embarqués dans une nouvelle aventure et inscrits dans la liste d’une centaine d’artistes et peintres muralistes venus du monde entier pour la nouvelle et troisième édition du Loures Art Festival. Ce festival a pendant longtemps contribué à la réalisation de fresques au sein d’un même quartier avec des photos qui ont fait le tour du monde et que vous avez certainement vues. Mais il n’y a aujourd’hui quasi plus de murs de disponibles alors la politique de l’organisation est de s’étendre. Nous, nous allons peindre à quelques minutes du cœur du festival.
La centaine d’artistes venus de partout crée une atmosphère particulière, et nous nous retrouvons alors dans une ambiance entre vacances et travail, sachant que parfois notre travail se transforme en vacances et nos vacances en travail. Nous nous rendons là-bas pour vivre une expérience humaine et remplir notre tête de nouvelles rencontres et d’expériences nouvelles.
En si peu de temps, les souvenirs s’accumulent et s’entassent dans nos petites têtes. Ils sont nombreux à la fin du séjour et c’est à ce moment là que nous savons que nous ne regrettons pas une seule minute d’être venus et d’avoir fait tant de kilomètres pour vivre cette aventure. La vie est belle parfois longue, souvent trop courte mais c’est en vivant des choses comme celles-ci que nous avons consolidé notre binôme, confirmé notre démarche et inscrit notre travail. C’est au fil des voyages et des rencontres que nous avons solidifié tout cela.
Sur ce genre de festival, c’est compliqué et difficile de se faire une place, de tomber sur une organisation parfaite mais il faut réussir à se détacher mentalement de tout cela et vivre l’expérience à fond. Nous avons pris la route un dimanche pour une arrivée prévue le lundi en fin de matinée, début d’après midi. La route ne s’arrête plus et devient interminable. Nous mettrons dix heures depuis Bordeaux et pour un de nous deux, il faut compter deux de plus venant de Toulouse. Les images défilent à travers la vitre, la chaleur s’inscrit belle et bien dans notre champ de vision. Nous décrivons beaucoup d’usines fermées et de maisons abandonnées et même si vous connaissez notre passion pour ces lieus, nous ne pouvons malheureusement pas nous arrêter partout. Nous trouverons tout de même quelques temps. Les nouveaux paysages s’installent, la langue change, très vite l’Espagne puis le Portugal nous animent. Nous dansons avec la vie, découvrons de nouvelles villes et rapidement nous mettons de côté nos appréhensions et laissons place à la joie de vivre et prenons confiance.
En tout, nous sommes restés quatre jours sur place. Quatre jours ça passe très vite. Nous n’oublierons jamais ce que nous avons vécu et le sac d’anecdotes est rempli à ras bord avec tout un tas d’histoires à raconter, celles qui nous font rire, qui nous servent pour avancer, grandir, des leçons de vie par dizaines, d’humanité, rempli de sourire, de temps en temps de souffrance, parfois physique et parfois morale, tant de choses qui nous aident à avancer, rester debout et qui continuent à nous motiver pour la suite.
Sur cette œuvre, ne sachant pas trop où nous allions et ayant une réelle contrainte de temps, nous décidons de ne traiter qu’un seul des trois éléments qui compose nos peintures : l’abstrait. Nous allons essayer, à l’aide de différents outils de faire en gros un petit détail. Nous nous basons sur une œuvre que nous avons vendue quelques jours avant. Nous mettons beaucoup d’énergie dans la réalisation de cette peinture. Pour les effets et les liaisons entre chaque couleur, nous utilisons un extincteur, des draps que nous trempons dans la peinture, des bombes pleines que nous perçons à l’aide de clous ou encore des balais énormes qui nous servent de pinceaux. L’idée est en gros d’arriver à faire ce que nous arrivons à faire en petit à l’aide de différents outils commercialisés et connus de tous dans le domaine artistique.
En dehors de toute cette technicité, les moments au pied du mur ou au sein du festival se multiplient et s’entassent tel des livres dans une bibliothèque. La liste est longue mais nous ne sommes pas prêts d’oublier : le dortoir de trente, les douches communes, toutes les langues qui s’entremêlent, l’anglais et l’espagnol parlés avec l’accent de chacun, les repas somptueux livrés au pied du mur, toujours le même rituel de notre côté, un plat végétarien et un normal que nous partageons car les deux sont excellents, puis les fruits, les barres céréalières, les cafés livrés. Il y a aussi un moment très important pour les portugais : les apéritifs improvisés comme cette fois où toute l’équipe municipale s’occupant du mur où nous travaillons sont venus un midi, avant le déjeuner. Ils avaient ramené plusieurs bouteilles de vins rouge et ils ont fait griller du chorizo et du boudin noir avec de l’alcool de pharmacie, le tout dans une assiette avec à l’intérieur deux couverts retournés. C’était magique. ? Dans les moments à la hauteur d’une victoire de coupe du monde, il y a aussi cet instant, ce graff avec José, ce truc incroyable qui te transporte sur une autre planète. Comme vous avez pu le constater, nous avons peint une cuve. Derrière l’endroit que nous avons graffité, il y a un petit espace pour passer, un espace que personne ne distingue de la rue, avec aucun vis à vis. Notre fresque est terminée. Nous sommes bientôt à la fin du rangement de notre matériel et nous gardons quelques bombes pour un éventuel graffiti sans intérêt et sans effort dans ce passage. Nous avons le boss au téléphone, il ne va pas tarder à arriver. Il dirige la SICAM. C’est une branche de la mairie qui gère cette cuve remplie d’eau et tant d’autres sur la ville. Toute la journée, nous avons des employés communaux à nos côtés, pour nous ouvrir la porte d’un local et le portail du lieu. A ce moment là, c’est José qui gère ça. Nous l’embarquons alors dans notre délire et nos idées d’adolescents. Au début, il fait le photographe professionnel en nous prenant en photo puis très vite nous lui passons des bombes et il s’éclate à son tour. Imaginez- vous la scène. Certaines photos ci-dessus peuvent en témoigner. Ce sont pour nous des moments indescriptibles, gravés à jamais dans le disque dur de Sismikazot. D’ailleurs, pour José aussi, puisqu’il nous l’a dit et tous ses collègues nous ont témoignés son enthousiasme et le fait qu’il se vente d’avoir vécu ce moment privilégié avec nous. Il montrait les photos à tout le monde. Malgré le peu de jours sur place, nous avons l’impression d’être restés quinze jours, quand nous repensons aux soirées avec les autres artistes, les petits déjeuners du matin dans les cafés locaux, toujours le même à vrai dire puis ce même café où nous avons regardé la France jouer son troisième match de la coupe du monde, le sourire des gens, le linge qui sèche au balcon, la multitude de drapeaux portugais qui flotte dans le ciel au milieu du peu de nuages qui décorent le ciel, la gentillesse des bénévoles, les dizaines et centaines de bombes aérosols entassées dans le shop éphémère du festival, et tant de choses encore qui dorment précieusement dans nos cœurs et dans nos têtes.
Voici une page qui se tourne et après quelques jours de repos une nouvelle qui s’ouvre. Au moment où nous écrivons, nous sommes à Saint Antonin Nobleval dans un camping pour six semaines en tout où nous allons travailler avec des jeunes en colonie de vacances. Le Portugal fut une merveilleuse expérience, peut- être un avant goût d’une plus grosse réalisation l’année prochaine au même endroit, revoir les mêmes gens et continuer ce que nous avons commencé. On verra bien d’ici là beaucoup d’eau aura coulé sous des centaines de kilomètres de ponts.
Nous tenons à remercier dans un premier temps, Jean Claude de City of Talent pour nous avoir mis sur le coup. Merci infiniment, nous sommes prêts et déterminés pour la suite.
Ensuite, un immense merci à toute l’équipe de Loures Art Festival. Ça a été assez compliqué au niveau de l’organisation mais nous sommes très heureux que vous nous ayez comptés parmi vous et accueillis. Ce festival est incroyable et nous en garderons un excellent souvenir. Merci infiniment à tous, bénévoles, chefs, assistants et tous les autres. Vous avez été merveilleux. Merci à toute l’équipe.
Gros gros big up à tous les artistes qui ont participé, ceux que nous avons juste croisés, salués et ceux avec qui nous avons partagé plus. Big up à tous les français, venus des quatre coins de l’hexagone, une spéciale à notre poto Lenz et son binôme, c’est une fois par an mais c’est toujours génial de passer du temps ensemble, à Maye, trop contents d’avoir passés du temps avec toi, c’était vraiment cool… Big up Hopare, Russ, Yoshi…. et tous les autres sans exception (nous ne sommes pas très bons avec les blazes). A vos soirées au terrain de basket pendant que nous avions besoin de sommeil !!!
A tous les gens que nous avons croisés sur la route, dans des bars ou ailleurs, à notre belle soirée à Lisboa. Les Portugais sont vraiment bons en viande.
Enfin, et pour finir, nous tenons à saluer la meilleure des équipes, celle qui a fumé le game haut la main. Nous parlons alors de l’équipe de la Siram guidée par Joao… Merci mille fois vous avez été merveilleux et vous nous avez si bien accueillis, c’était génial. La barrière de la langue n’a pas été un problème mais plutôt une richesse. L’accent anglais de José, les longues minutes où Fernando nous parle portugais pensant qu’en levant un peu la voix, nous le comprendrions mieux.
Merci et nous vous souhaitons tout le bonheur du monde. Maintenant, nous vous attendons en France.