Nous étions une semaine entière à Bordeaux pour préparer notre peinture, qui sera présentée lors de Transfert, qui est une exposition collective à laquelle nous participons. Chaque artiste, une trentaine au total, dispose d’une salle, nous avons appelé la notre Tunnel. On ne vous en dit pas plus jusqu’au 27 juin, lors du vernissage. Nous rentrons très tard le dimanche et nous nous levons le lundi en même temps que le soleil. Nous enchaînons avec ce nouveau projet qui nous tient fortement à cœur. Nous chargeons le matériel de peinture, réalisons plein de mélanges d’acrylique que nous mettons dans des bocaux normalement destinés pour les confits de canard et les conserves de cèpes. On prend des toiles et des chevalets, des bombes peu solvantées et nous voilà partis pour affronter les montagnes du Ségala. Nous arrivons dans la maison de retraite en haut du village de Sousceyrac. Ce bourg, nous le connaissons plutôt bien, en réalité comme si nous en étions les architectes ou du moins si on était venu plusieurs fois et qu’on avait loupé aucune fête au village entre 1998 et 2006. On a beaucoup de potes qui ont grandi ici et on a passé une partie de notre adolescence à boire des demis chez Gérard au Ségala, faire des tours de scooter au tour du lac du Tolerme ou dormir à la gendarmerie de manière officielle bien sur.
Concernant la peinture, nous étions revenus il y a deux ans pour décorer le mur de la piscine ou encore bien avant pour réaliser une bâche sur un festival.
Cette fois ci on change de décor et de public, nous nous retrouvons à la maison de retraite. L’idée est très simple, comme à chaque fois, on veut que le public avec qui on bosse ressente réellement notre état d’esprit et que chaque résident se sente impliqué au mieux dans le projet. Venir faire un graff « chez les vieux » pour juste faire un graff ça ne nous intéresse nullement. Notre approche avec un public spécialisé reste identique que sur un autre projet. En ce qui concerne le « rendu » nous avons deux choses qui doivent ressortir à la fin de la journée, peindre deux pans de mur et réaliser deux toiles.
Nous commençons cette belle journée ensoleillée (après le café en salle VIP) par une petite réunion d’équipe. On se retrouve dans une salle. Une dizaine de personnes d’un certain âge s’installent autour d’une table, des petits cafés, des sucres ou des sucrettes déguisent la planche de bois. Certaines chaises sont remplacées par des fauteuils roulants, comme pour venir à ce meeting, certaines jambes ont laissé places à des cannes ou des déambulateurs. Nous savons que ces deux premières heures sont très importantes. C’est grâce à celles ci que nos nouveaux potes vont le devenir. On fait un tour de table, avec la parole bien sur, on se présente, commence par réaliser quelques jeux puis très vite la timidité est remplacée par des chants et des choses drôles. Chacun fredonne un petit couplet de Nino Ferré ou Joe Dassin, certaines mamies nous mettent même la larme à l’œil. Remplie d’émotion, cette journée s’annonce plutôt bonne. Puis nous discutons des couleurs, chacun nous donne sa tendance puis à quoi ça lui fait penser, le rose pour la séduction, le vert l’espérance, le bleu c’est le ciel et le marron, les feuilles mortes ou les châtaignes.
Les deux thématiques que nous aborderons sur deux endroits différents de l’établissement seront l’hiver et l’automne. La partie abstraite sera réalisée par les résidents et par dessus nous viendrons réécrire des phrases récoltées toute la journée. Tels des artistes confirmés chaque papy et chaque mamie se donnent à cœur joie, certains ne comprennent pas, d’autre s’exécutent et une partie se prennent « grave » au jeu. On chante, on rit, on crie, on peint, on se fait des petites blagounettes. En fait, ça ressemble fortement à l’ambiance qu’il y a chez nous, dans notre atelier. Foutu pour foutu autant le faire avec le sourire.
Tout le monde a l’air content, le personnel oeuvre aussi ainsi que la présidente et le directeur. L’idée à la base comme à chaque fois est vraiment que tout le monde puisse participer. Puis il y eu le repas du midi, on va manger en ville et on croise Roger un de nos apprentis graffiteurs à qui, Aurore l’animatrice lui offre un café.On discute, on rigole. C’est avec un grand sourire que nous voyons Roger descendre dans le bourg, chantant l’hymne de notre journée avec des paroles simples mais qui effectivement peuvent rester dans la caboche : « Graffiti pour les papys, graffiti pour les mamies »
L’après midi continue toujours sur cette bonne dynamique, nous questionnons les gens au maximum, certains se livrent plus que d’autres mais les histoires et les souvenirs d’il y a plus de cinquante ans innondent nos feuilles puis il y a la pause goûter, le dîner à 18h, certains résidents restent et nous regardent faire. On ne voit pas les heures passer et le résultat final approche. On est vraiment content et super ravi de ce qu’on a fourni tous ensemble. Deux belles toiles ornent maintenant les couloirs au rez de chaussé comme dans les plus grandes salles d’exposition des capitales et tels des vitraux, deux fresques habillent les murs de la maison de retraite, l’hiver et l’automne. Peut être nous reviendrons l’année prochaine pour compléter notre quête des saisons, écouter les papys et les mamies nous conter les histoires d’antan. Nous sommes rentrés le soir à notre atelier avec des souvenirs pleins la tête, le coeur et l’âme gonflés à bloc grâce à nos petits vieux et cette belle journée.
Un immense merci à Aurore, l’animatrice de l’EPHAD de Sousceyrac pour nous avoir fait confiance et avoir fait appel à nous pour ce beau projet. Tu t’es démenée pour que ce projet aboutisse. On aurait vraiment aussi bien toi que nous aimer que ce soit le gros devis qui passe, pouvoir peindre plus, exposer dans tous les étages mais nous sommes déjà très heureux de l’espace que vous nous avez accordé.
Monsieur le directeur, Mr Vigreux, merci mille fois pour nous avoir accueillis dans votre établissement, nous remercions aussi madame la présidente, Mme Fau.
A Nadine, ça nous a fait super plaisir de passer ce petit moment avec toi et toute ton équipe, à la secrétaire, aux deux expertes comptables.
A Gérard Salgues, (putain) on a même pas eu le temps de venir te faire un bisou. Continu de bien nourrir nos nouveaux potes graffeurs 😉
Gîlles, ça y est t’es en retraite, vieilli pas trop vite pour pas que tu reviennes au taf dans une chambre cette fois.
A Leeza, son papy, sa maman, sa mamie.
A tous nos potes qu’on n’ a pas vu mais qui ont un lien avec Sousceyrac ou avec l’EPHAD directement, qui ont leur papys ou leurs mamies qui sont ici, leurs parents qui bossent ici… à Jean Phi, Pépette, Fabrice, Fabrice, Caro, Laurie, Coco, Frégea la chouette, Kisoux… et tant d’autres
Sousceyrac, nous suivra-t-il encore beaucoup?
Merci à tout le personnel qu’on a croisé Véronique, Roselyne, Brigitte, Sylviane, Maryse, Nadine (encore) Gilles, Hélène, Gaëlle, désolé pour les oublis…
Et enfin une dernière pensée, et une grosse très grosse dédicace à toutes nos graines de graffeurs, nos artistes peintres, nos vandales, André A., René, André R., Jean, Ginette, Irène, Christiane, Christiane, Elizabeth, Roger, Daniel, Josette, Bernadette, Michelle, Louis Thierry, Hervé, Paul, Nicole, et Simone.